L'INJURE

​

L'injure est l'argument du faible. Elle est le chemin le plus court pour accéder au royaume des médiocres.

Quand un malappris vous insulte gravement, et qu'il refuse de présenter des excuses, la sagesse recommande d'adopter l'une de ces deux attitudes:

​

1. Vous le toisez en souriant et, sans mot dire, vous passez votre chemin.

2. Vous le traduisez en justice, pour le préjudice subi.

​

Mais, quand vous vous mettez à l'insulter aussi, cela fait match nul. L'anecdote ci-après en est une parfaite illustration.

Le jeune curé Albert, un homme chaste et très brave, se lavait un jour tout nu dans une rivière, dans un coin isolé de la forêt, quand tout à coup, il aperçut, sur la berge, un fou tout nu.

​

Le fou s'empara de ses habits posés dans l'herbe, et détala à toutes jambes. Tout furieux, le curé sortit précipitamment de l'eau et, à poil, s'élança à la poursuite du fou.

​

Le jeune curé courait très vite, mais le fou courait encore plus vite.

Le fou emprunta le sentier qui menait au village, et surgit comme l'éclair devant l'église où étaient réunies des mamans choristes qui faisaient la répétition de quelques chants de Noël. Et lorsqu'elles virent les deux hommes courir l'un derrière l'autre, elles cessèrent brusquement de chanter, et fermèrent les yeux pour prier.

Au vrai, elles avaient fermé les yeux pour ne pas voir ce que le curé était censé devoir garder jalousement à l'abri des regards, durant sa vie sacerdotale.

​

Il y a trop de fous cette année-ci, s'exclama l'une des mamans, en rouvrant les yeux, et en se signant.

Oui, il y a trop de fous sur les réseaux sociaux aussi, et pas assez dans les asiles d'aliénés.